TERRA INCOGNITA





Existe-t-il des endroits encore inexplorés dans notre monde ? Vierges de tout passage ? Encore délaissés par les hommes ?

Bien peu de nos jours. Et c’est en cela que la Cordillère Darwin, cachée dans les terres australes, reste un lieu mythique. Protégée des hommes par son climat dantesque et ses formalités administratives frontalières, cette terre sauvage a toujours été un lieu d’inconnu et d’exploration. De Fitz Roy à Shipton, et plus récemment par le GMHM, le mythe de son inaccessibilité reste entier.

C’est dans cette optique de découverte, d’aventure et d’exploration que nous avons embarqués le 4 octobre 2022 à bord du voilier Pic’ La Lune depuis Ushuaia. Celui-ci allait devenir notre source de réconfort, de ripaille et de Manu Chao pour les 12 jours à venir.

A bord, une équipe digne du roman du Port de la Mer de Glace. Autant à l’aise en crampons et au timon qu’en pêche d’icebergs pour les glaçons de l’apéro. Au gouvernail, Diego – navigateur et géographe de la région – épaulé par Juanpi et Joël. Côté alpinistes, notre cordée franco-argentine comprenait également Seba – guide local d’Ushuaia et fin connaisseur de la région.

Grâce à cette tribu fueguina (comprenez de Terre de Feu), nos problématiques logistiques, administratives et gastronomiques ont su être facilitées. De même que l’accès aux connaissances géographiques « précises » de la région : cartes et topos sont des données rares et bien gardées.

Pour cette expédition, aucun objectif de sommet n’avait été clairement établi. Au vu des conditions climatiques lunatiques et du manque d’informations terrain, la stratégie reposait plutôt sur une liste d’idées – du plan A à Z. Les maîtres mots restants adaptabilité et exploration.

Parmi cette liste darwinienne, 3 zones avaient su retenir notre attention : l’île Gordon, le fjord de Pia et son accès au Monte Darwin, et le Monte Frances.


EXPLORATION DE LÎLE GORDON – MONTE APERO

Profitant d’une courte et humide fenêtre météo, notre 1er débarquement nous a menés dans le fjord des Tres brazos. Le relief adouci de l’île nous a permis d’y sortir nos spatules. Même si la quantité de neige n’était pas celle espérée, nos peaux de phoques ont su trouver un passage vers l’un des sommets voisins. Fiers et humides sur la cime, en contact radio avec le reste de l’équipage, nous le baptiserons Monte Apéro. En l’honneur de l’activité phare des soirées au bateau. De retour à bord, face au manque général d’enneigement de l’île, nous décidons de ne pas poursuivre cette option, à la place nous mettons les voiles.


EXPLORATION DU FJORD DE PIA – CERRO PIC’ LA LUNE & CERRO MIRADOR

Une nouvelle ouverture météo nous permet de débarquer hâtivement dans le fjord de Pia enserré de glaces. L’objectif principal restera modeste au vu du climat du jour : il s’agit de trouver une nouvelle route d’approche vers le mythique Monte Darwin, en joignant le glacier Romanche.  Cette fois-ci, la sensation d’isolement et d’éloignement est intense. Décuplées par l’immensité du lieu et l’absence totale de traces humaines, de sentiers et par la difficulté des communications radios.

Depuis le rivage, rejoindre les parties neigeuses se transforme immédiatement en guérilla sylvestre, avec une mention spéciale pour les épineux Calafates. Puis, une fois sur le fil des arêtes, notre avancée se retrouve freinée par les conditions climatiques patagonnes – à base de vent cinglant et de neige. L’équipée du jour aura quand même réussi à parcourir l’ensemble d’une belle crête neigeuse vierge, continuant son travail de baptême. Du Cerro Pic’ La Lune au Cerro Mirador, cette nouvelle route permet une future jonction avec le glacier Romanche. Cette tentative journalière aura également été une occasion incroyable de repérage, de production d’images et de cartographie de ce fjord pour de futures excursions.

Malheureusement, de retour à bord, les pronostics météos se détériorent franchement, avortant ainsi tous nos espoirs de tentative sur le Monte Darwin. On remet les voiles vers une nouvelle option.


EXPLORATION AU MONTE FRANCES

Culminant à 2261m, ce sommet fait partie des cimes majeures de la Cordillère Darwin. Vaincu pour la 1ère fois par Shipton lui-même via le glacier Holanda, 5 répétitions ont eues lieu depuis. Amarrés, voire harnachés, dans la Caleta Olla, notre équipe affine sa stratégie agitant pronostics météo et boule de cristal. Une lueur d’espoir climatique nous pousse à un portage express jusqu’à la laguna Frances où nous installons un camp de base.

2 jours plus tard, nous y entamons notre course contre la montre pour le sommet. Si le départ se fait sous les étoiles dans la liesse générale, le sommet lui virera au chaos patagonique. Dans la tempête, face et sourcils en congères, nous débusquerons finalement le sommet GPS et radio au poing. La descente au milieu des crevasses et des accumulations de neige fraîche se fera désespérée, en bonne partie à l’aveugle et à la roulette russe. Le climat patagon a su tenir ses promesses.


Et quelques heures plus tard, en fond de cale sur une mer du retour déchaînée, déjà le debrief de cette expédition s’impose. On s’accorde à le dire, ce projet Terra Incognita aura été une belle expédition, riche en découverte et en apprentissage.

Pas d’exploit ni de prouesse à proprement parler, non. Mais une aventure qui reste malgré tout unique et engagée. Une aventure pleine de défis que ce soit météorologique ou géographique, humain ou logistique. 

  • Météorologique bien sûr, par le climat dantesque de Patagonie et la fureur de ses éléments. Auxquels il a bien fallu faire face et s’adapter coûte que coûte.
  • Géographique, par l’inconnu, l’isolement et l’inaccessibilité de la Cordillère Darwin. Ces paramètres ont d’ailleurs su décupler la sensation d’exposition et d’engagement tout au long de cette expédition. Nous faisant revoir bien à la baisse les difficultés techniques envisagées lors de nos tentatives et excursions en terre australe.
  • Humaine, car toute expédition reste avant tout une aventure qui se partage. Dans les moments difficiles et les joies du sommet. Dans les prises de décisions et les demi-tours. Dans les moments d’attentes et de frustration. Il a fallu rester une équipe.
  • Logistique, par l’imprévisibilité foisonnante autour de toute cette expédition et qui a rendu tous les plans B jusqu’à Z encore possibles.

Et finalement, ce sont bien tous ces défis, cet isolement et cette nature brute que nous étions venus chercher à Darwin. Une terre qui a encore de nombreux secrets à révéler. Une terre d’aventure et d’exception. Une terre d’exploration.


TRUCS & ASTUCES

TERRE D’EXPLORATION

Les terres de la Fin du Monde ont toujours fascinées et attirés les explorateurs et les navigateurs de tous poils. Magellan, James Cook, Shipton, Fitz Roy, Darwin… C’est d’ailleurs lors du passage de ce dernier que le canal de Beagle fut baptisé ainsi en hommage au nom de son bateau.

PAS DE FUMEE SANS FEU

Pourquoi la Terre de Feu se nomme-t-elle ainsi ? Allez poser la question à Charles Quint ! Lors de son arrivée en 1520 à l’extrême sud des Amériques, Magellan vit depuis son bateau les feux de camp des autochtones Yamanas et nomma le lieu Tierra del Humo (« Terre de Fumée »). Charles Quint, à qui les exploits de Magellan furent contés, pensa en toute logique, qu’il n’y avait pas de fumée sans feu, et rebaptisa l’île « Terre de Feu ». Le chef à toujours raison !

MALDITO CASTOR !

En 1946, le ministère de la Marine a importé 25 couples de castors du Canada pour développer le commerce de la fourrure. Cette tentative se révéla être une véritable catastrophe ! Les castors se sont reproduits comme des lapins sans la présence de prédateurs, et l’on en compte aujourd’hui plus de 250 000 ! Ils sont responsables de dégâts considérables dans toute la région : forêts décimées, rivières détournées, inondations, destruction de routes… Bien loin de l’image de la gentille bébête !

CENTOLLA, STAR DES PROFONDEURS

Grande star de la cuisine locale, la centolla (prononcé centocha pour les puristes) est une araignée de mer aux grandes papattes. En gratin, en soupe… il y a mille façons de déguster ses guiboles. Et comme pour les coins à champignons chez nous, les nasses à centollas sont des données bien gardées !


LES BONNES ADRESSES

Antartica Hostel – Ushuaia : Grande AJ très conviviale avec une belle mezzanine chaleureuse. Prix en chambre double assez cher cependant.

Note : 4 sur 5.

💲💲💲💲

Hostel Cruz del Sur – Ushuaia : Grande AJ bariolée et remplie de messages des voyageurs. Personnel ultra sympa et arrangeant, ils vous aideront à programmer aux mieux vos excursions et sont habiles pour jongler avec les réservations de taxis et autres bus..

Note : 3.5 sur 5.

💲💲

Tante Sara – Institution de la ville, ce café-bar moderne reste l’un des meilleurs rapports qualité-prix de la ville. Portions gargantuesques et très argentines !

Note : 3.5 sur 5.

💲💲💲

Cafe Martinez – Ushuaia : Principal concurrent à Tante Sara, le café Martinez à tous les ingrédients pour passer un délicieux moment de cocooning autour d’une boisson chaude et d’une pâtisserie au retour d’une virée sur le canal ou de montagne !

Note : 4.5 sur 5.

💲💲💲💲

Casa Olmo – Ushuaia : Resto-bar qui a élu domicile dans une des anciennes habitation de la ville…. celle de la grand-mère de Séba ! Ici le décor n’a pas changé, vieux parquet et décors marin sauront vous mettre dans l’ambiance et en appétit. Très bon choix de bières !

Note : 4.5 sur 5.

💲💲💲

El Mercado – Ushuaia : Autre enseigne de la trilogie qui inclue Tante Sara, ce resto aux allures italienne est un bon point de chute pour les estomacs de la ville.

Note : 4 sur 5.

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